Un effort pour assurer un meilleur avenir aux familles de pêcheurs cambodgiens

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Au Cambodge, les gens se demandent certainement les uns aux autres : « Comment se déroule votre récolte cette année ? » Mais ce n'est pas le cas des 20 000 réfugiés cambodgiens qui se sont réinstallés le long du delta de la rivière poissonneuse de Sacrame

Ancien bouddhiste devenu pasteur adventiste, Sophat Sorn distribue des brochures aux réfugiés cambodgiens de Stockton pour les avertir du niveau nocif de mercure de la zone de pêche du delta. La présence de cette substance a un lien avec les problèmes de mémoire et d'apprentissage.
Ancien bouddhiste devenu pasteur adventiste, Sophat Sorn distribue des brochures aux réfugiés cambodgiens de Stockton pour les avertir du niveau nocif de mercure de la zone de pêche du delta. La présence de cette substance a un lien avec les problèmes de mémoire et d'apprentissage.

Au Cambodge, les gens se demandent certainement les uns aux autres : « Comment se déroule votre récolte cette année ? » Mais ce n’est pas le cas des 20 000 réfugiés cambodgiens qui se sont réinstallés le long du delta de la rivière poissonneuse de Sacramento-San Joaquin. Ici, « Comment vos enfants se débrouillent-ils à l’école ? » est un appât pour entamer la conversation.


« Au cours des années, les cambodgiens ont eu de plus en plus de problèmes avec leurs enfants. En effet, beaucoup de ces enfants ne réussissent pas très bien à l’école. Ils abandonnent leurs études et rejoignent des bandes » explique Sophat Sorn, lui-même immigré cambodgien. Travailleur social dans la communauté, cet ancien bouddhiste est devenu pasteur adventiste à Stockton.


S. Sorn raconte que des chercheurs californiens en santé et environnement ont été à la pêche à l’explication de cette délinquance. Ils ont découvert un lien entre des problèmes d’apprentissage et de mémoire et une alimentation contaminée en mercure. En 2004, S. Sorn et un groupe de volontaires ont commencé à distribuer des brochures dans toute la région, pour avertir les cambodgiens que le poisson du delta était contaminé de mercure.


Sur le recto de chaque brochure bleue, on peut lire en caractères gras jaunes : « Préservez votre santé, mangez un meilleur poisson ». A l’intérieur, il y a des informations sur le lien qui existe entre la perte de mémoire et le poisson contaminé, sur le nombre de poissons que l’on peut consommer en toute sécurité? On trouve aussi une carte du delta qui indique les voies navigables polluées.


S. Sorn ajoute que le port de Stockton est sous surveillance, mais que la plupart des khmers natifs (dont beaucoup gagnent leur vie de la pêche) ont grandi en tirant leur dîner du trouble Mékong, sans subir de conséquence néfaste. C’est pourquoi ils ont du mal à croire que l’eau du port faussement limpide abonde de polluants. S. Sorn espère qu’avec les brochures imprimées en khmer, les cambodgiens vont apprendre à pêcher du poisson plus sain pour que leurs familles soient en meilleure santé.


S. Sorn explique : « Vous savez, c’est une information très étrange pour eux. Dans un premier temps, c’est comme s’ils résistaient au message. Mais nous continuons à leur parler, toujours avec beaucoup d’amitié. Nous leur expliquons qu’au Cambodge, nous n’avons pas souvent de moyen pour tester l’eau, alors qu’ici, ils ont ce moyen. C’est alors qu’ils commencent à nous écouter. Ils nous disent : « Hou la ! Nous ne savions pas que ce poisson pouvait être mauvais pour nous ».


S. Sorn dit que le mercure, les PCB et les pesticides qui se répandent dans le port de Stockton se sont accumulés à des niveaux toxiques dans la zone de pêche. Ainsi, ils sont devenus omniprésents dans la cuisine cambodgienne.


S. Sorn se rappelle que « tous ces gens mangent du poisson deux à trois fois par jour, alors que les autorités recommandent d’en manger un à deux fois par mois ».


Sovanna Koeurt est directrice d’‘Asian Pacific Self-development and Residential Association’ et membre du groupe adventiste cambodgien de Stockton dont s’occupe S. Sorn. Elle affirme : « Lorsque les cambodgiens voient le panneau ‘Ne mangez pas le poisson qui est pêché ici’, ils considèrent que cela veut dire que le poisson qui est pêché un peu plus loin est bon’ ».


S. Sorn répond : « L’eau a l’air propre, alors ils ne croient pas que le poisson est mauvais ». Ils se méfient aussi tout particulièrement des avertissements des officiels du gouvernement.


Cette suspicion est compréhensible pour S. Sorn, car la plupart des réfugiés cambodgiens ont survécu au régime barbare de Pol Pot qui fut responsable d’au moins 1,5 millions de morts par exécution, travail forcé et faim. « S’ils ne vous connaissent pas et ne vous font pas confiance, ils ne vous écouteront pas ».


S. Sorn a grandi au Cambodge, dans une famille bouddhiste qui vivait de l’agriculture. En 1971, il a rejoint l’armée républicaine qui combattait les khmers rouges. Il avait alors 18 ans. Lorsque la république est tombée entre les mains de Pol Pot en 1975, S. Sorn a atterri dans un camp de travail forcé. Plus tard, S. Sorn et sa famille se sont enfuis d’un camp de réfugiés qui se trouvait à la frontière entre le Cambodge et la Thaïlande pour échapper à la mort ».


Huit années plus tard, S. Sorn et sa famille ont été acceptés par le gouvernement américain pour transfert de réfugiés et ils ont immigrés en Californie en 1991. S. Sorn s’inscrivit alors au centre universitaire mais il fut rapidement remarqué par le gouvernement local pour travailler avec la communauté cambodgienne à Stockton.


S. Sorn affirme : « Je devais me faire connaître de nombreuses personnes de la communauté, vous savez. Il fallait que je gagne leur confiance ». En 2000, il fonda ‘United Cambodian Families’, une organisation locale à but non-lucratif, et fut reconnu pour ses services rendus à la communauté par la Croix Bleue de Californie, le congrès américain, et par le Département de Santé Publique de Californie et la Division d’Investigation en Santé Environnementale ce mois-ci.


Au cours des trois dernières années, S. Sorn et des volontaires ont distribué les brochures à plusieurs milliers de réfugiés cambodgiens qui vivent dans cinq communautés différentes dans la région de Stockton. « Cette année, je délègue » dit-il. Producteur de programmes pour une émission de programmation de la Radio Adventiste Mondiale qui diffuse depuis Guam, S. Sorn s’occupe de traduire des bulletins d’information pour 15 millions d’auditeurs cambodgiens.


« Nous souhaitons que chacun sache, non seulement pour le mercure dans le poisson, mais en ce qui concerne Jésus ». Sa devise est ‘Ne parlez pas beaucoup mais agissez beaucoup’, car il se décrit comme un « homme timide ».

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